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Dix ans de films et séries Netflix : de l’audace des débuts à l’impasse du formatage

Pour un abonné des premiers jours, l’évolution du catalogue Netflix peut sembler déconcertante, tant les grandes ambitions des débuts semblent avoir été progressivement abandonnées à mesure que le paysage concurrentiel s’est durci. En 2014, Netflix a le visage de Kevin Spacey. Cynique héritière d’A la Maison Blanche, la série House of Cards impose tout de suite un standard élevé pour les « Netflix originals », avec son casting premium et la réalisation de David Fincher. Avec son modèle fondé sur la mise en ligne de saisons intégrales, la plate-forme impose un nouveau rythme à la production et à la consommation de séries, et ringardise, au moins pour un temps, le modèle des networks et du câble.
Netflix se distingue dans les années suivantes par sa capacité à attirer de grands noms du cinéma et de la télévision, avec la promesse de budgets élevés et d’une grande liberté. Aux côtés de séries grand public comme The Crown apparaissent ainsi des objets plus complexes et auteuristes comme The OA (2016) ou Mindhunter (2017). La plate-forme signe un contrat de développement avec Fanny Herrero (Dix pour cent) et un peu plus tard, elle alignera des millions pour s’offrir les services de showrunners en vue – ces directeurs de série que l’on s’arrache, comme Ryan Murphy ou encore Shonda Rhimes.
En parallèle, elle se lance dans une large « glocalisation » de son catalogue. L’immense succès de La Casa de papel témoigne de son flair pour les séries venues d’ailleurs : aujourd’hui, c’est sur Netflix qu’on peut voir à quoi les séries venues d’Inde, du Koweit ou encore de Corée ressemblent. Avec des jackpots à la clé, tel celui de la sanguinolente Squid Game. Du côté des productions françaises, les ambitions sont plus molles. Les belles intentions de Drôle et Tapie peinent à masquer le formatage de Marseille, Plan Cœur et autres Lupin. Au point que l’expression « série Netflix » est devenue une façon de nommer le paradoxe qui associe un nivellement par le haut des productions et une faible ambition artistique et/ou à un refus total de toute polémique.
Il y a bien des exceptions, comme Ripley, série en noir et blanc rachetée à Showtime, qui avait renoncé à la diffuser, ou encore La Diplomate, série politique sous l’influence d’Aaron Sorkin, mais aucune ne peut rivaliser avec Dahmer ou Stranger Things en matière d’audience. Ce lissage de la production a toutefois un point positif, qui est une promotion inédite de la diversité des points de vue. Parce qu’elle se veut grand public, la plate-forme doit parler à tout le monde, y compris aux minorités, qui y bénéficient d’une surexposition bienvenue.
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